Elections dans le Tamil Nadu

Depuis quelques semaines, des affiches gigantesques fleurissent dans toute la ville.

Quand j’ai découvert la première, j’ai pensé qu’une campagne anti-corruption avait été lancée par le gouvernement et par conséquent que des portraits de gangsters étaient diffusés avec offres de belles primes à qui serait susceptible de livrer l'un d'eux. J’ai recherché en vain le « wanted » sous les photos mais tout étant écrit en tamoul, pas moyen de savoir.

source internet, candidat souriant mais dubitatif !

Sur une grande toile tendue, il y avait un personnage peint en grand format, joufflu, moustachu, les sourcils épais en bataille, un regard pervers et un sourire machiavélique (il ne manquait plus que l'éclat sur la dent en or) et tout autour une vingtaine de portraits d’hommes tous plus lugubres les uns que les autres, eux ne souriaient pas, formats photos d’identité "photomaton", vous savez ceux qui vous font paraitre vingt ans de plus et vous transforment en dépressif ou en repris de justice notoires. Le parrain et ses hommes de main.

Mais non, je me trompais, renseignement pris auprès du chauffeur, notre source d’information principale, j’ai appris que c’étaient les photos des candidats pour les législatives afin d’élire les mayors, aussi appelés chairman, les maires donc. Je me suis dit que les attachés de communication devaient être ronds comme des queues de pelle le jour du shooting.

Ces élections ne seraient pas très importantes pour les indiens comparées aux élections des  membres du parlement. Pas importantes certes, mais au vu des rassemblements animés le soir dans les rues autour des voitures, rickshaws qui scandent à tue-tête des slogans dans les haut-parleurs, haranguant les habitants à voter pour eux, je me demande ce que doivent être les élections importantes. Mais nous sommes en Inde, rien ne se fait à moitié et les indiens sont nombreux.

Maintenant que mon chauffeur m’apporte mon journal, the Times of India,  tous les matins (et oui, encore un privilège) j’ai pu glaner quelques informations. J’ai appris que la loi garantissait normalement 19 % des sièges aux basses castes, mais il a été annoncé que le pourcentage de sièges sera fonction de la part des basses castes dans le Tamil Nadu.

J’ai lu également, les indiennes peuvent se réjouir, que la loi obligeait les partis politiques à présenter un minimum de 33 % de femmes pour la parité… A moins que les femmes ne portent la moustache dans le Tamil Nadu, je n’ai pas trouvé la parité flagrante.

N’empêche que depuis mai 2011, le Chief Minister du Tamil Nadu est une femme, Jayalalitha, 63 ans, reconvertie dans la politique après une carrière d’actrice couronnée de succès qui l’a rendue très populaire.

Lors de sa campagne, Jayalalitha, a fait comme tous les politiques, elle a fait beaucoup de promesses. Entre autres, elle a promis d’accroître le niveau de vie des populations pauvres et en même temps leur indépendance économique. En Inde, il est courant d’offrir des cadeaux, voire de l’argent contre un vote. Elle a donc promis d’offrir à ceux qui voteraient pour elle des mixeurs (indispensable à la ménagère pour broyer le gingembre, noix de coco … la maid m’en a réclamé un dès le premier jour avant tout autre chose), des ventilateurs (venez passer une journée ici et vous comprendrez pourquoi, la clim étant réservée aux plus riches), des vaches, des chèvres, des ordinateurs portables pour les étudiants des universités publiques, etc.  

Imaginez le scénario en France : Hollande promet une cafetière, Sarkozy un presse-agrumes, Le Pen une trancheuse à jambon, Besancenot une sorbetière…

Les hommes ou femmes politiques ne tiennent pas leurs promesses ? Et bien en Inde si, Jayalalitha a tenu ses promesses et la distribution des cadeaux a eu lieu le 15 août 2011 pour la modique somme de 500 millions d’euros.

Hier matin, une délégation d’une dizaine indiens avec des écharpes tricolores (noir, blanc, rouge) est venue à pied jusqu'au portail de notre maison pour venir chercher des promesses de vote. C’était probablement un des quatre candidats avec ses colistiers. J'ai aperçu le gardien leur expliquer, à grands renforts de gestes, que nous n'étions pas concernés par les élections municipales et ils sont repartis... Dommage, j’aurai bien discuté quelques minutes.

J’ai quand même lorgné pour voir s’ils n’avaient pas un ventilateur, un mixeur ou une vache avec eux... 

De temps en temps, de mon jardin, je vois passer des vaches sur la plage, elles sont seules et je ne sais pas à qui elles appartiennent...